La somnolence diurne excessive (SDE) est un symptôme fréquent en consultation du sommeil. Si l’apnée obstructive du sommeil est l’une des causes les plus connues, elle n’explique pourtant pas tous les cas. De nombreux patients continuent à souffrir d’une somnolence invalidante malgré un traitement efficace de leur apnée, ou sans aucun signe d’apnée lors des examens.
Pour le médecin somnologue, identifier les autres étiologies est essentiel afin de proposer une prise en charge adaptée et améliorer la qualité de vie des patients. Explorons ensemble les principales causes à rechercher.
Quand parler de somnolence diurne excessive ?
La somnolence diurne excessive se définit par une propension anormale à s’endormir le jour, dans des situations inadaptées (au travail, en réunion, au volant…). Elle s’évalue grâce à des outils cliniques comme :
- L’échelle d’Epworth, qui mesure la tendance à s’assoupir dans différentes situations,
- Les tests de maintien de l’éveil (TME) ou de latence d’endormissement (TILE), utilisés en laboratoire du sommeil.
Une SDE persistante impacte fortement la vie sociale, professionnelle et la sécurité (risque accru d’accidents). Son exploration ne doit donc jamais être négligée.
Troubles du rythme circadien
Parfois, la somnolence diurne est liée non pas à une pathologie du sommeil, mais à une désynchronisation de l’horloge biologique.
Syndrome de retard de phase
Souvent observé chez les adolescents et jeunes adultes, il entraîne un endormissement tardif et un réveil difficile. Le patient cumule ainsi un déficit chronique de sommeil.
Travail posté et jet lag
Les horaires décalés, les rotations de nuit ou les voyages transmeridiens perturbent le cycle veille-sommeil et induisent une somnolence importante dans la journée.
Hypersomnies centrales
Au-delà des troubles circadiens, certaines pathologies spécifiques peuvent expliquer la SDE.
La narcolepsie
Maladie rare mais invalidante, elle se caractérise par une somnolence irrépressible, des endormissements soudains et parfois une cataplexie. Le diagnostic repose sur une polysomnographie suivie d’un test de latence d’endormissement multiple (TILE).
L’hypersomnie idiopathique
Moins connue que la narcolepsie, elle se traduit par une somnolence persistante malgré une durée de sommeil normale, sans cataplexie. Les patients rapportent souvent un sommeil non réparateur.
Causes médicales et psychiatriques
La somnolence diurne peut également être le reflet d’autres affections médicales ou psychologiques.
Dépression et troubles anxieux
La dépression peut s’accompagner de fatigue et d’hypersomnie, tout comme certains troubles anxieux. L’entretien clinique est déterminant pour différencier fatigue psychique et réelle somnolence.
Pathologies endocriniennes et métaboliques
Certaines maladies comme l’hypothyroïdie, le diabète mal équilibré ou l’insuffisance surrénalienne peuvent entraîner une baisse de vigilance.
Maladies neurologiques
La maladie de Parkinson, la sclérose en plaques ou certaines lésions cérébrales peuvent également se manifester par une somnolence accrue.
Médicaments et substances
De nombreux traitements médicamenteux ont pour effet secondaire une sédation :
- Antihistaminiques,
- Benzodiazépines et hypnotiques,
- Neuroleptiques,
- Certains antidépresseurs.
Par ailleurs, l’alcool et les substances psychoactives accentuent le risque de somnolence diurne excessive.
Le rôle clé du médecin somnologue
Face à une SDE, le médecin somnologue doit :
- Explorer les antécédents médicaux et médicamenteux,
- Analyser les habitudes de sommeil et l’hygiène de vie,
- Recourir aux explorations spécialisées (polysomnographie, TILE, TME) lorsque nécessaire,
- Travailler en coordination avec d’autres spécialistes (endocrinologues, psychiatres, neurologues) selon l’étiologie suspectée.
Son rôle est aussi d’accompagner le patient dans la compréhension de son trouble, d’ajuster les traitements et de renforcer la vigilance face aux risques (accidents de la route, baisse de productivité, altération cognitive).
La somnolence diurne excessive n’est pas toujours synonyme d’apnée du sommeil. Elle peut résulter d’un manque chronique de sommeil, de troubles circadiens, d’hypersomnies centrales ou encore de pathologies psychiatriques, endocriniennes et neurologiques.
Pour le médecin somnologue, la clé réside dans une démarche diagnostique rigoureuse et pluridisciplinaire, afin d’identifier la cause sous-jacente et de proposer une prise en charge adaptée.
En élargissant le champ des investigations au-delà de l’apnée, il devient possible d’améliorer significativement la qualité de vie et la sécurité des patients.